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Le Précompte immobilier : régionalisation au 1er janvier 2021 et réévaluation en vue de votre revenu cadastral !
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Vendredi, 8 janvier 2021

1. Rappel des principes :

Chaque année, vous payez un impôt appelé précompte immobilier qui est un impôt calculé sur la valeur du bien immobilier dont vous êtes propriétaire et le revenu qu’il est censé théoriquement générer.

Le calcul de ce précompte s’effectue en effet sur la base du « revenu cadastral ».

Le revenu cadastral est en réalité un revenu fictif censé être payé pour l’occupation du bien immobilier de vous êtes propriétaire.

Ce revenu est fictif car il est fixé par la loi à un moment de référence.

Actuellement ce moment de référence est toujours le …1er janvier 1975.

Vous auriez donc obtenu le montant de ce « revenu » si vous aviez loué votre bien le 1er janvier 1975.

Autant dire que ce montant n’est plus tout à fait d’actualité…

Il s’agit d’un loyer fictif « net » puisque l’on doit retirer les montants forfaitaires établis pour les réparations et l’entretien du bâtiment (40% pour les immeubles bâtis et 10% pour les terrains).

Ce montant de référence fixé en 1975 devait être actualisé régulièrement et ne l’a pas été.

Ce travail de réévaluation du précompte immobilier constitue une tâche titanesque pour le pouvoir taxateur.

A l’origine, il s’agissait du gouvernement fédéral.

L’impôt est à présent régionalisé depuis le 1er janvier 2021 et la région wallonne a marqué déjà tout comme certaines communes sa volonté de réactualiser cette valeur locative fictive.

L’impôt sur le bien immobilier a toujours été, en Belgique, un sujet sensible puisque notre pays comporte un taux de propriétaires particulièrement élevé et toucher à la « brique que le Belge a dans le vente » reste un sujet politique délicat.

Inutile de dire que la crise actuelle va inciter les pouvoirs taxateurs à revoir ce prélèvement à la hausse.

Alors que le revenu cadastral est simplement adapté depuis 1991 à l’indice des prix à la consommation via un coefficient, il s’agira cette fois-ci non plus d’une simple adaptation à l’indice des prix mais bien d’une réévaluation du loyer de base.

Théoriquement, cette réévaluation pourrait bien se faire à la baisse comme à la hausse en fonction de l’état de l’évolution du bien.

Toutefois, il ne faut pas se faire trop d’illusion…

L’essentiel voire la quasi-totalité des nouvelles évaluations se feront à la hausse.

Il suffit en effet par exemple de prioriser ses réévaluations en commençant par certains quartiers pour s’assurer d’une hausse de la taxation.

En outre, inutile de dire que depuis 1975, personne ou presque n’a spontanément déclaré à l’administration fiscale les travaux qu’il a entrepris à son habitation pour l’améliorer.

La procédure est toutefois effectuée :

- lorsque vous construisez un nouvel immeuble puisqu’il faudra bien alors fixer avec l’administration une valeur de départ du revenu cadastral

- ou lorsque vous effectuez des travaux soumis à permis d’urbanisme qui sont alors portés à la connaissance de l’administration et donc celle-ci vous envoie un formulaire ad hoc pour corriger votre revenu cadastral et effectue une réévaluation du revenu cadastral.

Dans la pratique, lorsque vous avez transformé votre maison (par exemple, simplement en ajoutant une nouvelle salle de bains, une nouvelle cuisine, en améliorant simplement le confort de l’habitation), vous êtes normalement tenu de communiquer spontanément ces informations à l’administration sous peine d’amende administrative voire pénale…

Après cette déclaration, l’administration vous adresse une rectification.

Elle peut également envoyer un agent estimateur sur place pour fixer le revenu cadastral.

Lorsque ce nouveau revenu cadastral vous est notifié, vous disposez d’un délai de deux mois afin d’introduire une procédure de réclamation par lettre recommandée.

Vous devez proposer et justifier un nouveau montant et l’administration prendra sa décision définitive.

L’évaluation de votre revenu cadastral peut parfois être surprenante.

Les évaluateurs qui sont envoyés se basent sur des critères parfois subjectifs et accordent parfois une valeur démesurée à certains éléments comme par exemple la réalisation d’un parking.

On a déjà vu un simple lit de cailloux servant de parking recevoir une valeur totalement extravagante au motif que cela augmenterait sensiblement la valeur de l’habitation ?

Les évaluations sont parfois très discutables et il convient pour effectuer un recours avec de bonnes chances de succès de vous entourer d’un professionnel technique et sans doute même de votre conseil juridique afin de rédiger correctement ce recours.

Les montants réévalués peuvent être importants et impacteront durablement votre niveau de taxation sur l’ensemble de la période au cours de laquelle vous allez rester propriétaire de l’immeuble ainsi réévalué.



2. Le précompte immobilier est également une taxe communale :

Le mode de calcul du précompte dépend également de votre commune.

Il faut savoir que si le taux de base est fixé au niveau régional, chaque commune fixe librement les additionnels au précompte immobilier qui représentent un montant non négligeable et peuvent varier d’une commune à l’autre, parfois du simple au double.

L’importance de votre précompte immobilier dépend donc également de la commune dans laquelle vous habitez.

Ce ne sont pas nécessairement les communes les plus aisées qui taxent le plus, bien au contraire.

Cette situation est susceptible en outre d’évoluer d’année en année et ce en fonction de l’évolution des finances communales.

La situation peut donc évoluer rapidement et il y a donc peu de prévisibilité et de certitude à cet égard.



3. Que se passe-t-il en cas de vente de l’immeuble ?


L’administration fiscale ne prend en considération que le propriétaire de l’immeuble au premier janvier de l’année civile.

Cela signifie donc concrètement qu’une vente de l’immeuble en cours d’année entraîne malgré tout la taxation intégrale dans le chef du propriétaire de l’immeuble au premier janvier.

En d’autres termes, si vous vendez l’immeuble par exemple le 15 janvier, le propriétaire au premier janvier sera redevable de l’intégralité du précompte immobilier pour l’ensemble de l’année.

Le palliatif à cette situation sans doute injuste est de convenir contractuellement avec l’acquéreur d’une répartition de ce précompte immobilier « prorata temporis » dans votre acte de vente.

Généralement, votre notaire le prévoira mais il convient d’y être attentif afin d’éviter de devoir supporter la charge fiscale pour toute l’année et ce pour un immeuble dont vous ne seriez même plus propriétaire.



4. Moyens à dispositions de l’administration :

Tout d’abord, l’administration qui souhaite opérer une réévaluation du revenu cadastral enverra un formulaire si elle a connaissance de travaux effectués.

Vous avez 30 jours pour répondre à cette demande.

Vous devez déclarer tous les travaux effectués et qui sont susceptibles d’apporter une valeur complémentaire à votre immeuble.

Cela va des travaux de rafraîchissement classiques à l’aménagement d’une salle de bains, d’une cuisine, à la pose d’une véranda, à des nouveaux VELUX, des nouveaux châssis, des travaux d’isolation, etc…bref, la liste est longue et l’on ne pense pas nécessairement à cette déclaration spontanée qui pourtant est obligatoire lorsque l’on effectue ce type de travaux.

Lorsque l’on effectue des travaux qui ont nécessité l’octroi d’un permis d’urbanisme, l’administration est forcément informée de la nature de vos travaux et s’enchaîne alors une procédure de déclaration et le cas échéant de contrôle.

Si vous ne répondez pas dans le délai ou si l’administration estime que votre réponse n’est pas suffisante, elle peut d’office procéder à une réévaluation de votre revenu cadastral sur base des informations dont elle dispose et il vous appartiendra alors de contester cette réévaluation dans un délai de 2 mois.

Elle peut également envoyer un évaluateur visiter votre habitation, lequel rendra un rapport estimatif.

Comme indiqué précédemment, les critères d’évaluation sont parfois nébuleux et les évaluateurs ont parfois tendance à accorder une importance surévaluée à certains des éléments comme par exemple un parking (même réalisé avec un simple lit de cailloux).

Il convient d’être extrêmement attentif à cette nouvelle évaluation car les conséquences financières peuvent être extrêmement et particulièrement importantes pour une durée très longue.

Il ne faut pas perdre de vue non plus que l’administration, avec l’évolution des technologies et la digitalisation de la vie quotidienne dispose à présent d’éléments lui permettant de trouver elle-même les nouveaux travaux ou nouveaux aménagements à votre habitation.

Nous n’en sommes pas encore à l’utilisation de drones mais il ne faudra pas exclure que l’administration veuille un jour se servir de ce type d’instruments.…

Plus simplement, cela fait plusieurs années que l’administration a commencé à surveiller les évolutions de vos propriétés depuis le ciel…A cet égard, par exemple, google street view peut permettre de détecter l’apparition d’une nouvelle piscine ou d’une nouvelle annexe qui n’aurait pas été spontanément déclarée …

Enfin, prenons l’exemple d’une annonce de vente immobilière.

Lorsque vous placez une annonce sur un site de vente par exemple, non seulement vous donnez un descriptif complet et actualisé de votre immeuble mais également de son état, le tout accompagné de photos et même d’un prix (parfois surévalué).

Inutile de préciser également que vos profils sur les réseaux sociaux et les photos publiées peuvent parfois également aussi amener des informations utiles.

Un nombre important de personnes aime annoncer à tout le monde qu’ils ont réalisé une nouvelle piscine, une nouvelle annexe ou simplement de nouveaux travaux.

« Big brother is watching you ».

Sans doute malheureusement pour la vie privée et votre porte-feuilles, un peu plus favorablement pour les finances publiques, il deviendra de plus en plus difficile de ne pas être soumis à une forme de surveillance de plus en plus régulière de vos aménagements.

Bon nombre de Belges seront donc sans doute prochainement confrontés à cette réévaluation.

Soyez-y attentif et consultez pour répondre à l’administration le cas échéant, un conseil technique et votre conseil juridique.


Julien Tricot

Avocat associé 109
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