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L’assurance obligatoire de la responsabilité civile décennale des entrepreneurs, architectes et autres prestataires du secteur de la constructionA. Objectif :
L’objectif de la loi est :
- de mettre fin à la discrimination entre l’architecte soumis à une obligation d’assurance et l’entrepreneur qui disposait de la faculté de s’assurer ;
- d’assurer une meilleure protection du maître de l’ouvrage ; et, enfin,
- de limiter le coût pour le consommateur (ce dernier objectif devra se vérifier dans la pratique).
B. Qui est concerné ? L’entrepreneur
« L’entrepreneur » sera obligé de souscrire une assurance décennale si les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies :
1. celui-ci intervienne sur le territoire belge
2. que l’intervention d’un architecte soit obligatoire pour les travaux
3. et enfin qu’il intervienne dans des travaux de stabilité et d’étanchéité pour du gros œuvre fermé.
Ce ne sont donc pas tous les entrepreneurs d’un chantier qui seront concernés ni pour tous les travaux. Seuls les entrepreneurs qui réalisent des travaux susceptibles d’engager leur responsabilité décennale sont visés.
Remarque :
L’exposé des motifs de la loi décrit les professions qui seraient éventuellement soumises à cette loi, c’est-à-dire le couvreur, le placeur de châssis, le poseur de chapes, pour autant que ces travaux tombent dans le concept « gros œuvre fermé ».
C. Quel bâtiment est concerné ? L’Habitation familiale
Quant aux « bâtiments » visés, la loi explique en son article 2, 4° qu’il s’agit uniquement du « bâtiment destiné au logement ».
Il s’agit donc « d’un bâtiment ou partie d’un bâtiment notamment la maison unifamiliale ou l’appartement qui, dès le début des travaux immobiliers, de par sa nature ; est destiné totalement ou partiellement à être habité par une famille, éventuellement unipersonnelle dans lequel se déroulent les diverses activités du ménage ».
La loi prévoit aussi que « ne sont pas des habitations » : « les chambres situées dans les logements collectifs, c’est-à-dire des bâtiments où au moins une pièce d’habitation ou un locale sanitaire est utilisé par plusieurs personnes n’ayant pas toutes entre elles un lien familial ».
On vise alors clairement l’habitation familiale.
D. Quels travaux sont concernés ? Quel est l’objet de l’assurance ? Les travaux rentrant dans le cadre de la garantie décennale
il s’agit des travaux portant sur :
- La responsabilité civile décennale
- Limitée au gros-œuvre fermé de l’habitation
La responsabilité décennale est définie comme étant celle « visée aux articles 1792 et 2270 du Code civil, pour une période de 10 ans à partir de l’agréation des travaux, limitée à la solidité, la stabilité et l’étanchéité du gros-œuvre fermé de l’habitation lorsque cette dernière met en péril la solidité ou la stabilité de l’habitation, à l’exclusion :
1. Des dommages résultant de la radioactivité
2. Des dommages résultant de lésions corporelles suite à l’exposition aux produits légalement interdits
3. Des dommages d’ordre esthétique
4. Des dommages immatériels purs
5. Des dommages apparents ou connus par l’assuré au moment de la réception provisoire ou résultant directement de vices, défauts ou malfaçons connus de lui au moment de ladite réception
6. Des dommages résultant d’une pollution non accidentelle
7. Des frais supplémentaires résultant des modifications et/ou améliorations apportées à l’habitation après sinistre
8. Des dommages matériels et immatériels inférieurs à 2.500 euros ».
Les exclusions prévues par la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances sont également d’application (risques de guerre, catastrophes naturelles et suicide).
E. Qui est assuré ?
L’article 2.1.1° et 3° vise les personnes qui seront considérées comme assurées.
A la lecture de la loi, les sous-traitants sont également soumis à l’obligation de s’assurer.
Toutefois, quid du recours en cas de couverture par l’assurance de l’entrepreneur principal par rapport à des travaux réalisés par ses sous-traitants ?
A cet égard, étant donné que les sous-traitants ont l’obligation de s’assurer et ont donc qualité d’assurés, aucun recours subrogatoire ne pourrait alors découler d’une condamnation de l’assurance de l’entrepreneur principal à payer des travaux mal réalisés par son sous-traitant. Le sous-traitant n’a pas qualité de tiers.
Le bon réflexe sera de faire intervenir à la cause le sous-traitant en sollicitant sa condamnation en garantie.
F. Durée de la garantie
Celle-ci est de dix ans à dater de la réception de travaux et pour autant que les vices touchent à la solidité, la stabilité et l’étanchéité du gros œuvre fermé mettant en péril l’habitation.
G. Type d’assurance
Quant à l’assurance, différentes modalisations sont prévues : assurance globale par projet, assurance globale par abonnement, assurance globale pour tous les intervenants, assurance individuelle par projet, assurance individuelle par abonnement. (article 8 de la loi).
La prime sera à déterminer par le Bureau de Tarification.
Ce bureau est là aussi pour permettre à l’entrepreneur d’être assuré en cas de refus par les assureurs.
H. Preuve de l’assurance
Au niveau probatoire, le chapitre 5 de la loi annonce la remise d’une attestation qui confirme la couverture conforme à la présente loi et ses arrêtés d’exécution.
La Roi pourra déterminer la forme et les modalités de l’attestation (arrêté royal à venir).
L’attestation doit être remise par l’entrepreneur avant l’entame de tous travaux immobiliers : 1° au maître de l’ouvrage, 2° à l’architecte qui doit impérativement la réclamer, 3° à l’ONSS, 4° à la première demande à l’agent habilité à surveiller l’application de la présente loi (cfr chapitre 8 de la loi).
En possession de cette attestation, et en cas de cession des droits réels liés à la vente du bien immobilier, le maître de l’ouvrage devra transmettre au nouvel acquéreur l’attestation avec vérification et éventuellement responsabilité du notaire chargé de la vente.
En cas de financement de travaux, le maître de l’ouvrage devra remettre les attestations au prêteur du financement des travaux (organisme de crédit).
Par dérogation, il est possible pour l’entrepreneur de constituer un cautionnement dans les mêmes limites et exigences que la garantie de l’assurance obligatoire.
I. Sanction
Le non-respect par l’entrepreneur d’une souscription d’assurance ou par un autre prestataire du secteur de la construction engage leur responsabilité pénale : amende de 26 à 1.000 € - article 15.
J. L’architecte : la nouvelle loi du 31 mai 2017 modifie-t-elle le régime d’assurance obligatoire déjà appliqué à l’architecte ?
La présente loi vient modifier la loi du 20.02.1939 telle que modifiée par la loi du 15.02.2006 et l’arrêté du 25.04.2007 relatif à l’assurance obligatoire.
Au niveau des nouveautés, la nouvelle loi :
- abroge l’article 9 et 11, al. 4 de la loi du 20.02.1939 (respectivement art. 9 : Toute personne physique ou personne morale autorisée à exercer la profession d'architecte conformément à la présente loi et dont la responsabilité, en ce compris la responsabilité décennale, peut être engagée en raison des actes qu'elle accomplit à titre professionnel ou des actes de ses préposés doit être couverte par une assurance. Cette assurance peut s'inscrire dans le cadre d'une assurance globale pour toutes les parties intervenant dans l'acte de bâtir et art. 11, al 4 : Est puni des mêmes peines celui qui exerce la profession d'architecte sans avoir préalablement assuré sa responsabilité civile conformément à l'article 9. Est également punie de l'amende visée à l'alinéa 1er, toute personne morale qui exerce la profession d'architecte sans avoir préalablement assuré sa responsabilité civile conformément à l'article 9) et les remplace par la loi du 31.05.2017.
- précise un régime obscur au niveau de la garantie ouverte en cas de survenance des dommages liés à cette responsabilité décennale. La garantie dans le temps est liée à l’agréation des travaux et non plus à dater de la fin de l’inscription de l’assuré au tableau de l’ordre, ancien article 6 de l’arrêté du 25.04.2007. Le texte est donc plus clair.
- limite l’étendue de la couverture des architectes à la responsabilité décennale, aux vices graves bien définis dans le gros œuvre et aux bâtiments destinés aux logements alors qu’auparavant, le champ d’application de l’arrêté de 2007 visait l’activité globale de l’architecte (responsabilité contractuelle : RC décennale et RC pour vice caché véniel, responsabilité extracontractuelle).
Quid de l’arrêté du 25.04.2007, du règlement de déontologie approuvé par l’arrêté du 18.04.1985 ?
A ce stade, force est de constater qu’il semble exister un manque de clarté, de sécurité juridique.
K. Contrôle ? Conseil de l’Ordre un réceptacle et l’architecte
Quant au contrôle du respect de l’obligation d’assurance, auparavant, les entreprises d’assurances étaient informées par le Conseil de l’Ordre par le biais d’un document par architecte reprenant les assurances de ce dernier. Ce régime est conservé.
Toutefois, une nouvelle obligation d’information est à charge de l’assureur qui doit transmettre chaque année au Conseil de l’Ordre la liste des architectes assurés, avertir le Conseil de l’intention de résilier certains contrats d’assurances, transmettre trimestriellement la liste des contrats résiliés ou suspendus.
Le Conseil de l’Ordre devient ainsi un réceptacle de toutes les informations relatives aux architectes et à leur contrat d’assurance.
Il sera alors primordial pour toute convention d’architecture de transmettre les coordonnées de l’assureur, le numéro de police d’assurance et les coordonnées du Conseil de l’Ordre.
Quant au contrôle par l’architecte, ce dernier devra, avant l’entame des travaux, s’inquiéter et demander la transmission de l’attestation de l’entrepreneur.
A défaut, un devoir de contrôle de l’architecte pourrait être mis en cause et conduire à une responsabilité de l’architecte pour un non-respect de la vérification des attestations. Ceci pourrait conduire, in fine, à ce qu’un juge considère que la responsabilité de l’architecte soit plus lourde en cas de la survenance d’un sinistre lié à la responsabilité décennale où l’architecte n’aurait pas procédé à une vérification des assurances.
Ce régime pourrait être calqué sur celui du défaut d’accès à la profession de l’entrepreneur.
Un architecte pourra être par ailleurs, en vertu des articles 15 à 19 de la loi, condamné à des amendes pénales ou des poursuites. En effet, des agents seront là pour établir des procès-verbaux en cas de non vérification de l’obligation de transmettre la preuve d’attestations d’assurances par l’entrepreneur. En cas de non-paiement de l’amende, l’agent pourrait transmettre au Procureur du Roi.
Enfin, en cas d’impossibilité pour l’architecte d’obtenir un contrat d’assurance, un bureau de tarification a été introduit afin de permettre à tout architecte l’obtention d’une telle assurance.
L. Questions – réponses
- En cas de construction d’un complexe d’immeubles par appartements, la couverture de 500.000 € prévue à l’article 6 1° et 2° vise-t-elle l’ensemble du complexe ou par appartement ? La réponse est que, pour chaque sinistre, le montant de la couverture est de 500.000 €. Dès lors, en cas de complexe par appartement avec une question de responsabilité décennale, chaque appartement sera couvert pour son sinistre à hauteur de 500.000 €.
- L’absence de souscription de l’assurance implique-t-elle la nullité du contrat d’entreprise ? La réponse est que, a priori, le contrat n’est pas nul car il ne s’agit pas d’une condition d’exercice de la profession, et ce contrairement à l’architecte.
Toutefois, s’agissant d’un contrat d’entreprise individualisé, la question de la nullité du contrat reste étant entendu que l’entrepreneur aurait contracté sciemment, malgré son obligation légale, d’être assuré pour exécuter cet ouvrage. La question demeure ouverte !
Julien TRICOT et Mathieu DEVOS
Avocats Cabinet d’avocats 109